Laurent Leclerc, directeur général : «Auchan Sénégal, c’est un investissement de 65 milliards de FCfa en 4 ans».
Implanté en 2014 au Sénégal, le Groupe Auchan est en train de se positionner comme leader dans le commerce moderne, en termes de prix, de diversité de l’offre et de la qualité du service. Le Groupe est en train d’acquérir les magasins Citydia, ce qui lui permettra de réussir un bon maillage de la capitale et de certaines régions. Dans cet entretien, le Directeur général, Laurent Leclerc, revient sur la politique commerciale de son Groupe, tout en dégageant les perspectives dans les 4 prochaines années.
Pouvez-vous nous présenter le Groupe Auchan Retail arrivé au Sénégal ?
Concernant le groupe, sachez que pour construire un commerce moderne, Auchan Retail met ses clients au cœur de toutes ses orientations : prix discount, choix et diversité de l’offre, qualité du service, adaptation aux habitudes de consommation locale, prise en compte des comportements d’achat multicanaux. Le groupe est le 11e distributeur alimentaire mondial avec 51,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires hors taxe et est présent dans 17 pays. Nous disposons de 3.715 points de vente et sommes le 35ème employeur mondial avec 345.365 collaborateurs.
Et votre déploiement à l’international ?
Dans chaque pays, une approche locale en synergie avec les écosystèmes nationaux autour de 4 axes fondamentaux : répondre aux besoins de consommation de l’ensemble des clients du pays, participer, en synergie avec les écosystèmes locaux, au développement économique du pays, encourager l’emploi et l’employabilité dans chaque pays et agir en acteur responsable. Au Sénégal, Auchan Retail s’est implanté depuis septembre 2014. C’est le 1er groupe de distribution d’envergure internationale à investir directement en Afrique de l’Ouest. Déjà, Auchan est le premier distributeur à ouvrir dans la banlieue de Dakar et dans les régions (hors station balnéaire de Saly) Thiès aujourd’hui, Travaux en cours à Mbour (ouverture mi-décembre) et Guédiawaye, obtention du permis de construire à Keur Massar. Nous avons près de 1.000 collaborateurs, dont 98 % de Sénégalais avec plus de 10 milliards FCfa de chiffre d’affaires hors taxe en 2016 réalisés sur 11 points de vente aujourd’hui.
En quoi consiste réellement le projet d’Auchan Retail au Sénégal ?
Pour Auchan, il s’agit de contribuer, à la démocratisation d’un commerce moderne, accessible à tous et répondant aux attentes de la grande majorité de la population sénégalaise. Le projet qui s’inscrit entièrement dans la vision du Plan Sénégal émergent (Pse) avec la modernisation graduelle de l’économie locale dont le développement des infrastructures commerciales, est un axe majeur. Il accompagne, au Sénégal, la démocratisation d’un commerce moderne, accessible à tous, offrant prix discount, choix et diversité de l’offre, qualité du service, adaptation au mode de consommation local, une réponse diversifiée aux différents modes d’achat (ex : magasin implanté directement dans les quartiers ou lancement du e-commerce). Et il concerne l’ensemble du territoire sénégalais avec des implantations adaptées à chaque zone (petit magasin de quartier, supermarché, hypermarché…).
Qu’est-ce qui a poussé votre groupe à s’implanter au Sénégal en 2014 ?
Le Sénégal est un pays démocratique faisant preuve d’une grande stabilité politique et économique. C’est une référence en Afrique de l’Ouest. En outre, nous nous inscrivons dans la vision du Plan Sénégal émergent.
Quelle est l’ambition du Groupe Auchan au Sénégal et quels sont vos projets en Afrique de l’ouest ?
Auchan souhaite devenir la référence des commerçants modernes dans le pays. Ceci en synergie avec les écosystèmes locaux, Auchan change la vie de ses clients grâce à la démocratisation d’un commerce moderne, accessible à tous et répondant aux attentes de la grande majorité de la population sénégalaise. Notre priorité aujourd’hui est de réussir au Sénégal.
Quels sont les volumes d’investissements prévus sur ces quatre années ?
Auchan Retail Sénégal, c’est un investissement de 65 milliards de FCfa en 4 ans, 50 magasins à Dakar et dans les régions à l’horizon de 4 ans, dont les 9 magasins Citydia de Dakar ou encore le projet de Mbour. La priorité sera donnée aux produits locaux avec la création de filières sur les fruits et légumes avec des garanties de volumes auprès des exploitants.
Comment s’est déroulé le processus d’acquisition des magasins Citydia ? Où en êtes-vous réellement ?
Sur ce dossier, il y a quelques mois, nous avons été contactés par les dirigeants de Citydia pour échanger sur la possibilité de reprendre leur réseau de magasins. En effet, leur contrat de franchise arrivait à échéance et il ne souhaitait pas poursuivre dans ce métier. Nous y avons vu une belle opportunité pour accélérer notre développement et servir nos clients. Durant toutes les négociations, la sauvegarde de l’emploi a été la priorité des deux parties. A ce jour, nous avons conclu la reprise de 3 magasins et sommes en cours de finalisation pour les 6 autres. Nous espérons pouvoir conclure l’ensemble de l’opération avant la fin du premier trimestre 2018.
A terme, combien de magasins envisagez-vous ouvrir dans le pays ? Aussi, quelle est la part des produits sénégalais vendus dans vos magasins ? Ne peut-on pas craindre une invasion de produits importés ?
Nous verrons. Pour ce qui est des 4 années à venir, nous envisageons d’atteindre 50 magasins à Dakar et dans les régions. Concernant nos ventes, un produit sur 5 vendus dans nos magasins est issu de la production locale. Nous avons la volonté de faire grandir cette part tous les jours. C’est un moyen de satisfaire un plus grand nombre de clients avec des produits par essence moins chers que les produits importés.
Pouvez-vous nous donner quelques exemples d’acteurs locaux avec lesquels vous travaillez ?
Je précise que 100% des viandes et poissons vendus dans nos magasins sont des produits sénégalais, 90 % des légumes. Toute la production locale fruitière est présente dans nos magasins pendant la saison. Nous avons aussi d’autres produits comme ceux d’entretien et parfumerie, le concentré de tomate, l’arachide, les yaourts…
Vous évoquez la création de filières agricoles au Sénégal. Quels sont ces projets ?
Nous travaillons actuellement sur la filière légumes pour nouer des partenariats avec les producteurs en leur garantissant des volumes à l’année. Les choses avancent rapidement. Nous avons identifié plusieurs partenaires potentiels à Bayar, à Saint Louis, à Popenguine. L’idée est de travailler en direct avec les producteurs en s’engagent sur des volumes de commande sur plusieurs années. Ils pourront, avec cette aide, réaliser les investissements nécessaires au développement de leur outil agricole.
Vous annoncez atteindre 3.000 emplois à créer en 4 ans. Comment y parvenir et quels profils recherchez-vous ?
Nous recrutons dans des métiers très divers : employés libre-service, vendeurs, hôtes et hôtesses de caisse, professionnels de l’alimentaire, du management, gestion de centre de profit, systèmes d’information, comptabilité et finances, marketing, achats et négociation…
Quelle est la part des employés sénégalais dans vos effectifs ? Sont-ils à des postes de responsabilité ? Est-ce qu’ils ne sont pas confinés dans des rôles subalternes et avec un management confié à des expatriés ?
Tout d’abord, nous privilégions les recrutements de collaborateurs sénégalais et encourageons le retour de la diaspora sénégalaise. Nous avons donc 98 % de collaborateurs sénégalais. Le reste est constitué de collaborateurs français et africains de l’ouest. Les échelons de la direction sont composés à 75 % de collaborateurs sénégalais. Cette part tend à s’accentuer au fil du temps. Les collaborateurs français expatriés sont ici à durée déterminée pour transmettre leurs compétences et savoir-faire afin de permettre aux collaborateurs sénégalais de devenir des experts des métiers de la grande distribution.
Le groupe Auchan Sénégal est mis en cause dans un supposé scandale financier et foncier à Mbour. Qu’en est-il exactement ?
A Mbour comme partout ailleurs, nous respectons les lois et procédures administratives en vigueur. Depuis le démarrage de ce projet, en 2015, nous avons, bien sûr, respecté l’ensemble des procédures administratives prévues par la loi sénégalaise dont l’étude d’impact, la résolution du conseil départemental, avis des autorités concernées, avis favorables de la Ccod, l’approbation du bail par les autorités compétentes, obtention du permis de construire… Nous tenons d’ailleurs à ce sujet à partager l’indignation des journalistes qui ont été accusés d’être soudoyés par Auchan pour écrire des articles qui nous seraient favorables. Auchan respecte une charte éthique très claire à ce sujet. Ces accusations sont donc totalement infondées tout autant que celle d’un soit disant scandale financier.
Il semble que le préfet de Mbour n’aurait pas approuvé la convention de mise à disposition du terrain. Où en est cette affaire ?
La convention a déjà été signée par le maire et le président du conseil départemental. Le préfet nous a demandé de rectifier deux éléments mineurs pour valider définitivement le document (plan d’aménagement définitif de l’espace entre la route et le magasin, rappel de la procédure à suivre concernant l’autorisation d’exploitation). En revanche, le préfet a signé l’attribution du terrain au conseil départemental et le permis de construire.
Pourquoi avoir versé une partie de votre participation financière à la construction du complexe culturel de Mbour directement sur le compte de l’entrepreneur chargé de la construction du futur supermarché Auchan ?
Cette disposition était prévue dans les accords validés par les autorités compétentes. Sachant qu’en plus, cela nous permet d’être partie prenante directe du projet pour garantir sa réalisation dans les délais. En outre, nous avons versé uniquement la moitié du budget pour le lancement des travaux. Le reliquat devant être versé au fur et à mesure des différentes étapes de la construction.
Dans vos magasins, les prix sont attractifs surtout dans ceux nouvellement implantés. Malgré cette politique, certains clients craignent que vous augmentiez les prix une fois que vous serez dans une situation de quasi-monopole ?
Tout d’abord, nous tenons à préciser que nos prix sont identiques dans tous nos magasins. Les seules différences concernent les promotions et la gamme de produits présente dans nos linéaires : à produits identiques, il n’y a aucune différence. Nous sommes aujourd’hui en mesure de pratiquer ces prix grâce à l’organisation de notre entreprise. Demain, nous conserverons les mêmes prix pour continuer à satisfaire nos clients. Nous avons également la volonté de développer le « made in Sénégal » : ce qui devrait nous permettre de poursuivre notre politique de prix bas. C’est ce que nous faisons dans tous les pays où nous sommes implantés et qui nous permet d’être l’enseigne leader en prix dans 12 pays sur 14.
Des pays d’Europe centrale et orientale se plaignent de la politique des industriels de l’agroalimentaire qui distribuent sur leurs marchés des produits alimentaires vendus sous la même étiquette dans les pays d’Europe de l’Ouest, mais avec une qualité moindre et une composition différente.
Comment rassurer vos clients sénégalais qu’il n’aurait pas dans vos magasins des produits de double qualité ?
D’abord, les produits vendus dans nos magasins Auchan à la marque Auchan sont totalement identiques à ceux des magasins français. Ensuite, nous sommes très attentifs à la qualité des produits importés par les grossistes locaux. Nous sommes prêts à importer directement certaines gammes si les représentants de la marque au Sénégal nous proposent des produits de qualité inférieure. Enfin, un produit sur cinq vendu dans nos magasins est « made in Sénégal » et nous avons la volonté de faire grandir cette part tous les jours.
Source : lesoleil.sn